Finance, institutions et croissance dans les économies émergentes Revue économique, n° 59-6/ 2008
Les recommandations, quant au développement des systèmes financiers parmi les pays émergents, répondent le plus souvent à l’hypothèse d’une architecture financière optimale, incluant l’ouverture du compte de capital, l’adoption de règles juridiques de type common law, le rôle croissant des marchés d’actifs, l’adhésion aux standards prudentiels occidentaux… Mais les articles réunis dans ce numéro ne confirment pas un tel postulat. Plusieurs contributions établissent en effet la nécessité d’une combinaison équilibrée, au sein des systèmes financiers, entre les volets bank based et market based. Quant à l’hypothèse d’une supériorité des systèmes financiers fondés sur des règles de type common law, elle se trouve infirmée sous l’angle des contraintes de financement de l’investissement. Pourquoi, malgré la libéralisation du compte de capital, ce sont les pays ayant relativement peu fait appel à l’épargne externe qui enregistrent les taux de croissance les plus élevés ? C’est en partie à cause de la sous-estimation des contraintes macroéconomiques et des fragilités financières induites par les entrées de capitaux. Contrairement à certaines idées reçues, la gouvernance, c’est-à-dire les institutions assurant la transparence de l’action publique, le respect des droits de propriété, la libre entrée sur les marchés, l’étendue de la supervision prudentielle, ne semble pas jouer un rôle stratégique dans le décollage économique, mais plutôt, dans une seconde phase, dans l’amorce d’un processus de convergence. S’agissant de la réforme des normes prudentielles, il existe un biais incitatif favorisant les crédits à risque lors du passage de Bâle I à l’approche IRB de Bâle II. Enfin, le risque de contagion systémique entre les systèmes bancaires de plusieurs pays émergents paraît plus lié aux prises de risque sur les marchés d’actifs qu’à l’opacité des activités d’intermédiation.